jeudi

* ABERDEEN . [24-260211]

FOURTH STOP:
FROM GLASGOW TO ABERDEEN .



   Dans les bars ecossais, plus la musique est forte et plus les gens boivent. Et plus ils boivent, plus ils boivent. Pareil avec moins ils boivent. Exactement pareil. Sauf que dans ce cas, la musique est moins forte.

   Avant de partir, un ami proche m a dit que l Authenticite n existait pas et que la vie n etait qu un jeu de maitrise de nos masques. Alors ainsi mon voyage ne serviraitil a rien si je pars pour chercher mon Authenticite et ce qui se cache derriere mes masques?...
   J ai contacte une femme a Edimburgh en pensant que j y passerai cette semaine. Elle m a intriguee car elle a ecrit sur son profile qu elle etait une femme cameleon. C est un peu l impression que j ai, celle de n avoir de personnalite mais de pouvoir prendre la couleur de chaque personne, chaque situation pour s adapter. Elle ne pouvait pas m accueillir (voila pourquoi j ai fini a Glasgow) et m a dit que peut etre, ce qui se cache derrire nos masques est moins beau a voir que ceux ci et que c est pour cela que nous les portons...

   Je crainds de ne pas avoir peur. J attends dans un bar dans la gare d Aberdeen que Senthil mon nouveau CouchSurfer arrive. Il est en retard. Qu est ce que je disais...
   Il arrive enfin et on va directement chez lui manger en ecoutan du Tango. Et on parle. De tout. De la vie. Du changement constant. Du doute. Des oxymores qui sont le propre de l homme. En parlant avec lui, j arrive pour la troisieme fois a la meme conclusion: l Authenticite n existe pas. Tout change tellement et tellement vite qu on est pas une seconde pareil. Nous sommes nous meme seulement dans la solitude que la plupart fuie. Et c est en entrant en contact avec autrui que nous nous construisons, en se retirant dans la solitude qu on s ecoute et en faisant les deux en meme temps qu on devient ce qu on est et qu on est ce qu on devient.
   Le moment que je passe a parler avec lui est ancre dans le moment present comme jamais. Je lui explique les difficultes que j ai a rester dans le moment present. J ai comme beaucoup de gens tendance a rester crochee au passe, a cause des regrets et des remords, ou de toujours me projeter dans un avenir idealise, ce qui entrave le profit de l ici et maintenant. Senthil me demande "And right now? Do you have any regrets?" La seule reponse qui me vient instinctivement est "No, I don t". Il hausse les epaules comme si c etait une evidence. Et ca l est pour moi aussi.
   Des remords et des regrets, j en avais beaucoup avant de m en aller. A voir, sans que je ne m en apercoive, je les ai mis dans une boite que j ai abandonnee au port avant de prendre le large. Ce sont d ailleurs ces choix resultants ces regrets et remords qui m ont apportee ici, maintenant. Alors que faire sinon les accepter?...
   D apres Senthil, nous avons le choix entre trois choses dans la vie en societe: fuir les obligations, aller a l encontre du systeme ou se resigner et s ecraser sous le poids du devoir. N est ce pas, finalement, atteindre la parfaite harmonie que de jongler avec les trois plutot que de choisir une seule solution?...
   En parlant cet homme de voyage, j ai soudain l impression que quelque chose s ouvre dans mon esprit. Je ne peux pas encore dire quoi. Mais quelque chose. Peut etre que je viens de me cogner contre la Realite: celle qu il n en existe aucune.

   Dunnotar Castle. A 1h en bus d Aberdeen, apres Stonehaven. Un vieux chateau en ruines, depece, sur des falaises rocheuses frappees par les vagues en furie. Les mouettes s affolent au dessus et vont se nicher dans son ombre, comme si a present, c est a elles que ce chateau appartient.
   L odeur de la mer, le parfum du passe. Des images qui defilent dans mon imaginaire a chaque pas que je fais dans ces ruines. La chambre e la contesse, vue sur la mer du Nord. La cuisine, avec le trou dans le mur pour le feu. Le donjon des brigands, petit, noir et sombre, vide...
   Le bruit du vent, le cri des oiseaux. La sensation du vent et du soleil sur ma peau. Il y a quelque chose de reposant dans ces anciens lieux royaux. De reposant, de calme et de melancolique a la fois.

   Ballade dans le silence des highlands. Seul le vent ose m interrompre dans ma marche. Je l ecoute. Je le suis.

   Black Hill. Colonnes en cercle, accrochees au sommet d une colline au milieu de rien, en memoires a tous les Ecossais de Stonenhaven morts pendant la guerre mondiale.La vue y est magnifique. On y voit la mer du Nord, si profonde et si grande, qui, a l horizon, semble devenir le ciel.

   Retour sur Aberdeen. Son odeur est un melange entre des parfums de femme, de feu printanier et de mer agitee et calme a la fois.

   The Kirkyard of St Nicholas. Immense cathedrale avec un cimetiere. Les habitants aiment s y ballader et s asseoir sur un ban pour reflechir et bavarder.

   Aberdeen Art Gallery. Magnifique gallerie d art pres de l universite. L expo temporaire presentait l oeuvre photographique de l Americaine Diane Arbus (1923-1971). Une decouverte a faire pour les amateurs de photo! Elle a reussi a mettre en valeur des portraits de gens decales, peut etre ridicules mais inconscient de leur apparence absurde. Arbus photographie la personnification du kitsch en noir et blanc, comme une serveuse nudiste, le roi et la reine gagnants d un concours de danse du citoyen senior, des travlos burlesques ou des personnages de carnaval tatoues ou mangeurs d epee et de feu. J ai fini par me trouver moi meme ridicule, a rire toute seule au milieu de la gallerie...
   Dans la partie moerne de l expo permanente, une oeuvre m a tape dans l oeil: celle de Gavin Turk (ne en 1967) qui n est qu un vulgaire sac de couchage en nylon pose sur le sol. Ce qui est interessant, c est de voir le rapport avec le titre de l oeuvre: "Habitat". En effet, ce qu a voulu montre l artiste est que ce genre d habitat s est entierement fondu dans le paysage urbain et plus personne n y fait attention. C est une realite revolante, dans elle est soulevee dans la sorte a travers l art. Et pourtant, personne ne reagit. Parce que c est devenu commun.

   Les toilettes ecossaises sont etranges. Il faut pomper l eau avec une manette avant de la pousser. Sinon, ca marche pas. Et c est bon a savoir. Sinon, on peut avoir de mauvaises surprises...

   Le vent de l est ecossais tourne, tourne! Je mets les voile vers l ouest.

FROM ABERDEEN TO GAIRLOCH.

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