21th STOP:
Dans le train pour Copenhague. Pour la deuxième fois de ma vie. La première fois, c'était il y a tres longtemps, il y a presque deux ans. Premier voyage Interrail avec une autre Vadrouilleuse, ou nous riions dans le train a cause des nones devant nous qui tricotaient. (Nous avions pris un petit-dejeuner a Hambourg a base.. de bière... Peut-etre que c'était la cause de notre hilarité injustifiable.) Cette fois, je suis toute seule. Mon ipod n a plus de batterie, alors je dessine une danse macabre d'un mariage démoniaque, et je pense toujours a tout ce que je quitte lorsque je pars d'un endroit pour en découvrir un autre. Les nones semblent etre dans un autre wagon, a la place, il y a une Chinoise qui hurle de désespoir au télephone et un vieux canadien qui fait du backpacking. Il cherche le contact, mais je suis ailleurs, tellement loin quelque part...
Le train entre dans le ferry. On sort tous sur le pont. Je ressens le bonheur terrifiant de la liberte que la mer apporte. je respire le vent qui affronte mon visage et se niche dans mes cheveux pour les envoler.
On retourne dans le train. Encore quelques heures de voyage qui passent comme des secondes.
J'ai donné rendez-vous a Copenhague a un ami qui m'est cher.
Il m'attend sur le quai de la gare. Lorsque je le revois, je n ai pas l impression qu il soit reel. La derniere fois que nous nous etions vus, c etait a Berlin. J avais dormi trente minutes, je repartais prendre mon avion, nous nous quittions dans un appartement quelque part dans le Kreuzberg, apres avoir passe une nuit au Berghain, ou nous avions rencontres des oies Danoises - voila la raison de nos retrouvailles a Copenhague.
On va dans l auberge que j avais reservee, Hotel Jorgensen. C est en fait un hotel, et les sous sols sont l auberge. C est un peu comme le Titanic (oui je sais, j ai une certaine obsession du Titanic, je crois) ou les etages superieurs sont pour les riches comme Rose, et plus on descend dans les sous sols, plus on a de chance de croiser des rats et des creepy guys. Pas de chance, nous sommes au sous sol. Quand on s annonce a la reception, il nous indique comment parvenir a notre chambre lugubre, mais sitot que nous avons descendu les premieres marches, nous sommes perdus dans le dedale des couloirs sombres et glauques. Un vieux nous montre notre chambre. Des lits entasses, pas d endroit pour mettre nos affaires, des petites fenetres qui sont a la meme hauteur que les pieds qui marchent dans les rues. Des gens viennent, des gens partent. Il y a toujours ce Tunisien dans notre chambre, qui ne parle pas, qui regarde juste avec son sourire, ses chemises repassees. Il passe son temps sur l ordinateur, dans les couloirs, seul, jusqu a 3 heures du matin. Il s arrange aussi toujours pour entrer dans la chambre au moment ou nous y sommes. Il y a un vieux et gros qui debarque, qui fait du bruit quand il dort, et cette autre grosse un peu aigrie qui lui hurle dessus au beau milieu de la nuit «Can you stop doing this noise??! ... Voila le tableau. Faire abstraction du decor. De toute facon, on passe nos journees dans les rues.
La bibliotheque Royale est un immense batiment cubique, tout noir. Elle est d ailleurs surnommee le Diament Noir. Dans cette bibliotheque, il y a des ordinateurs qui donnent acces libre a Internet, mais il ny a aucun livre.
A Copenhague, les gens sont beaux styles et souriants.
Digital Art Festival. C est Gianni qui a trouve un flyer parlant de cela. Ca se passe au DR Byen. Nous avions reserve les bilets pour Internet et c est le cadeau que m offre Gianni pour mes 19 ans. Les performances se passent dans une petite salle etrange, a la lumiere tamisee entre le rouge et le bleu, montrant des portraits au pochoir sur bois de celebrites danoises. Quelques personnes de tout age assis sur des caisses. Une petite scene et une ambiance tres sobre, juste des gens qui montent sur scene, creet et s en vont.
Le premier artiste a monter sur scene est un saxophoniste qui experimente des sons etranges sur ordinateur, meles a celui du saxo qu il manie parfaitement, tanto ouvert et lancant sa plainte melancolique, tanto bouche et comme asphyxie. C est dur d entrer dans cette musique, car il n y a pas de rythm, pas de regularite a laquelle s accrocher.
Le deuxieme est tout seul, derriere une table avec son ordinateur et toutes sortes d objets etranges dont je ne comprends pas l utilite. Melange de bruits metaliliques, de machines brisees, de sons stridents qui se glacent dans l air. Experimentation devant des gens, uniquement par ordinateur, pas d instruments reels. L ambiance tourne et se retourne.
La troisieme performance me fascine litteralement. Dans le silence, dans l ombre, un corps de femme se deplace a meme le sol, comme un asticot qui se tord de douleur, une poupee desarticulee et sans os, qui avance vers un bel homme presque nu, portant autour de la taille une ceinture des plus bizarre. Le corps de femme se deplace dans un bruit de sucon qui aspire a de droles d images, jusqu a l homme qui la vetit ensuite lentement d un costume noir enroule de fil qui clignote d une lumiere fade et fluorescente. Au fur et a mesure que la danseuse trouve sa nouvelle peau, le bruit de son coeur commence a frapper comme les basses d une discotheque qu on ecoute depuis l exterieur. Ce corps qui brille en clignotant se leve, se meut dans l espace. Les bruits de basse deviennent oppressants et font bibrer toute la salle. Le danseru, attache a la femme, court autour d elle, comme apeure et attire, effraye et seduit. La femme continue de se disloquer dans une magnifique danse emotionnelle. Les deux corps se retrouvent finalement dos a dos. L homme se penche, la femme s envole soudain. La lumiere clignote encore, donnant toujours cette impression fantomatique sur ce corps noir. Le coeur s endort tranquillement, emportant la lumiere avec lui...
La quatrieme performance est un petit gugus qui arrive tout seul sur scene, toujours dans une sobriete particuliere, avec uniquement un ordi. Bruit de foule, de brouhaha. La salle est tres peu eclairee, rendant l ambiance d autant plus particuliere. Qui sont ces gens qui parlent? Et en quelle langue? QUe se passe-t-il? Un rythme s impose doucement. Les couleurs de la musique evoluent en chants gregoriens remixes, qui resonnent dans tout l espace. Une puissante energie s impose dans la salle et soudain, je perds conscience. Je laisse la musique entrer en moi et dessiner dans ma tete toutes sortes d images que je pensais voir que dans mes reves. La musique evolue, se construit petit a petit, s en va et s en revient toujours. Elle me prend par la main, je crois, et m emporte, et me eporte tres loin la haut, dans une dimension que j ignorais et quej avais pourtant deja goute. Des frissons parcourent mon corps, car ces images dans ma tete me fascinent, prenneant racine dans l essence meme de cette musiqu evoluant a travers le desaccord d un violon et la regularite d un train sur les rails. Soudain, je decroche. J ouvre les yeux et j observe autour de moi. Les gens sont par terre, affales sur les aisses, appuyes les uns contre les autres, les yeux fermes, la tete dodelinante. Ils ne sont pas la, ils sont tous ailleurs, dans leur propre monde. Cette salle qui paraissait si banales s est soudain transformee en havre de paix transe-musicale. J imagine que peut etre prendre des drogues font le meme effet, cette possibilite de voyager a l interieur de son corps, d etre soi meme plus que jamais en entrant dans un autre etat dans lequel la realite n a plus de sens... J aurais pu ecouter cette musique toute la nuit et me nourrir eternellement de sa puissance et de ses images...
Le second soir, nous sommes retournes voir les performances de ce festival. Meme ambiance que la veille, sauf qu il y a plus de monde.
Premiere performance est une violoncelliste si timide et genee, simple et angoissee, qui joue d une purete incroyable, devant un ecrant projetant une video absurde motrant un volalge de diverses situations telles que des pouces de mariee qui se tournent, une horloge en cerf et une bougie qui s animent devant de vieilles montagnes. Pour moi, le violoncelle est la voix de la Terre. Une voix grave et aigue a la fois, qui se plaint lentement comme depressive et triste, profonde et sensible.
Le deuxieme est un type qui provoque des sons aigus, aiguises, pointus qui giclent lentement et provoque la folie. En l ecoutant, ce que j appelle mon Mur Hermetique s est bati devant moi, pour eviter que j y entre completement. Les seules images que je voyais dans ma tete etaient l Allegorie de la folie humaine, de l enfermement... Je n avais pas envie d en savoir plus...
le troisieme fait une performance geniale titree «The Game is not a Game« Dj superbe qui mixe toutes sortes de sons, de rythmes et de bons discours, touches d une influence minimale. Derriere un ecran projetant des vieux jeux videos pixellises, meles a des films porno muets et des images du telejournal. j entre dans les images et soudain, je me rends compte que plus rien n existe a part le son e cet ecran, a cet instant. Tout a coup, toutes les petites choses qui me prenaient la tete, les petites angoisses quotidiennes et les reflexions sur l absurde du monde se sont resolus. Comme une lumiere qui illumine mon corps e l interieur et me chuchote «Regarde! Les problemes n existent pas!«
Cette sensation de plenitude s est davantage developpee avec le dernier artiste. Un grand Nordique tout de noir vetu, ave ses cheveux rases, mixe devant des images de neons cubique qui dansent et evoluent avec la musique, a la maniere de rubix cube psychedelique. Les images qui traversent mon esprit le charge d une grand energie positive et d un espoir pur, un bonheur degage, envole, en train de planer a l interieur de mon plexus solaire, mes poumons, mon estomac. C est cela que procurent les drogues? Tres bien. Alors j ai trouve la mienne. Apres les shows, je ressens le meme genre de sensation que quand je viens de ranger ma chambre. Je respire le propre, tout a ete depoussiere, nettoye de fond en comble, les vieilles choes inutiles et gardees depuis longtemps sont a la poubelle. Ca fait du bien de se sentir toute neuve.
Dans les salles de performance a Copenhague, il est interdit de prendre de photo mais permis de filmer.
Le musee d art national du Danemark. On y entre, c est gratuit. Un batiment blanc et tres moderne a ete appondu au plus ancien, lies tous deux par des couloirs vitres. Une grande partie montre en vrac des peintures de toutes epoques et origines, melangees, classes dans des salles par themes - portraits, peintures gothiques, nature morte, marine, historiques, Renaissance, Rembrandt et les jeux e lumiere,... La partie moderne-contemporaine montre surtout des oeuvres d artistes danois que je ne connaissais pas. Une oeuvre contemporaine de Ingar Dragset et Michael Elmgrein me heurte «Please keep quiet!« est une oeuvre dans une salle blanche, avec des lits d hopital dans 3 occupes par des mannequins on ne peut plus reels et humains. Le but est de montrer combien le silence d un hopital peut etre le meme que celui d un musee...
Ce que je hais par dessus tout, ce sont les hordes de gamins bruyants qui deferlent dans les musees et brisent irrespectueusement le murmure secret et silencieux es oeuvres accrochees aux murs.
Le phenomene des oeuvres de Larmes. Parfois, il m arrive de contempler un tableau si beau et charge d emotions que des picotements naissent dans mon nez et mes yeux, creant une fragilite du coeur, ouvran la porte de mes emotions, entrainant des larmes qui brouillent ma vue sans oser couler. Parfois, meme, des frissons parcourent ma moelle epiniere, du bas du dos jusqu au fond de la nuque, ou l inverse, suivant la grandeur de l emotion. C est ce que j appelle la Contemplation des Oeuvres de Larmes.
Voyager avec Gianni est facile. Il est tres independant et moi aussi. On se separe souvent, il retrouve les amis qu il avait rencontre a Berlin. Parfois je vais avec eux, pour sortir un mercredi soir jusqu a 3h du matin dans un bar tres cozy. Et parfois, je sors pour mon compte et je rencontre d autres gens. Il a sa vie, j ai la mienne, et puis on se retrouve, on se raconte, on partage un cafe en silence, ou on ecoute l autre vider son sac. Il est habitue a voyager seul et moi aussi. C est beau de se trouver ainsi, compagnon de route, sur la meme longueur d onde.
Dans les metros de Copenhague, il y a acces gratuit a Internet.
A Copenhague, le prix des restaurants change suivant les heures.
Dans les banques a Copenhague, le port du casque est interdit.
Les Danois qui sortent en soiree sont encore plus beaux que lorsqu ils se balladent simplement dans la rue.
La langue danoise de loin, on dirait du francais.
J aime observer les gens qui parlent une langue que je ne coprends pas. Chacun de leur mot est comme un code secret que l autre comprend aisement.
La nuit, certaines maisons sont illuminees d une petite deco absurde en neon, comme une ruche d abbeille par exemple.
Les habitants de Copenhague ne savent pas si l eau de Christiania est potable.
Je pense que je suis tombee amoureuse de Copenhague. J aime cette ville. Ville merveilleuse, au vent nordique qui emporte les gens. Cette ville couleur bronze ozyde, u melange de bleu et de vert telement clairs et limpides. Les gens osnt beaux, grands, aux yeux percants, au sourire illumine. Ils semblent distants, mais quand la glace se brise, ils sont les plus touchants du monde. Je suis frappee, car la plupart des gens que je croise dans la rue, a part les touristes, sont de types nordiques. Les Asiatiques, ce sont ceux qui recoltent les bouteilles et les canettes pour avoir un semblant d argent a depenser pour senivrer et oublier le froid des bancs du parc. Meme les restaurants de cuisine orientales sont servis par des Danois. Pas de prejuges, ce blog n est qu issu de mon observation objective., je tiens a le rappeler.
Sankt Petri. Eglise vide, sobre, blanche. Rien de special, pas meme de l ex terieur.
Vor Frue Kirke. Eglise longue, tres pure et sobre, aux multiples statues des apotres et Jesus. C est tout.
La Tour de Vor Frelsers Kirke. Le point le plus haut de la ville. J y grimpe les interminables marches pour enfin arriver toute essoufflee au sommet et contempler le plus beau panorama de Copenhague. C est impressionnant et je m accroche pour ne pas tomber, ar les escaliers sont glissants. Je suis fascinee par cette tour en colimasson, de plus en plus etroite, toute doree, aux aspirations presque orientales. Malheureusement, l eglise est deja fermee. Ce sera pour un autre jour.
Christiania. Quartier particuleir, completement hors du temps, petit village medieval du 21eme siecle, perdu dans une ville qui ne lui ressemble pas, festival de toutes sortes de drogues presque pire qu a Amsterdam. Il est interdit de prendre des photos et de telephoner. J y rencontre une femme, Natalia, qui est en train de fumer son joint avec son copain dans le parc, alors que son fils de 4 ans et demi cavale avec son Action Man dans les mains. Etrange rencontre.
Chaque jeudi soir, une petite maison au bord de Christiania donne la possibilite de faire de la meditation. Gianni et moi nous y rendons. La maison est magnifique, construite en bois et en hexagone. Ses habitants, des vrais nordiques, sont tres directs, carres, et chaleureux a la fois. A l etage de la maison, un grand espace, des coussins, le silence ou la musique reposante. Exercices de respiration. Je perds le control. Relaxation au sol dans la position du mort. Contact corporel entre tous, priere de la terre, l energie de tous ces corps en liens qui descend dans le coeur de la terre. Une heure qui passe comme une seconde. Dans l etrange magie de cette magnifique maison.
Dans les cafes danois, les tournees de cafe suivant la premiere sont moins cheres. Il suffit juste de demander d etre resservi.
Voyager dans une grande ville, passer de troquet a estaminet, de bar a cafe, de bistro a resto, pour toujours traquet l inspiration du Monde, l Absurde de l Anodin, le paranormal et l etrange, le banal et l injustifiable.
Dans les cafes danois, il y a une pancarte qui indique combien de gens au maximum peuvent rester dans le cafe.
7 Eleven, c est la coop Pronto en mieux, car c est ouvert toute la nuit.
A Norrebro, le quartier qui craint, il n y a pas beaucoup de maisons qui n ont pas de grafitis.
Plus on va au Nord, plus les terrasses des cafes et des bistrots mettent des couvertures monochromes IKEA a disposition de la clientele.
Les Danois mangent leur hamburger en otant le pain du dessus.
Les papas danois sont plus maternels que les mamans danoises.
Il n y a pas de grande Verite qui gouverne le monde, il y en a des milliers qui mises ensemble, comme la reconstitution d un grand miroir, forment la vraie face du monde, visage fait de paradoxes personnels. La mienne, de Verite, je l ai trouvee. C est l Authenticite. Et elle se vit dans la plus profonde solitude. Ou alors lorsqu on rencontre quelqu un qui nous laisse etre soi meme...
Vioxymore, etre fait de paradoxes et de voyages.
La Vie en voyage, c est une rue etroite dans laquelle je marche sans jamais me retourner. La seule chose qui existe, c est le but> atteindre la porte au fond de la rue. Et mon avenir se trouve deux metres devant chacun de mes pas. Je marche simplement en regardant droit devant. Et tout ce que je vis, la, maintenant s efface aussitot derriere moi. C est cette vie en voyage, ce bonheur ephemere, celui d un coeur vagabond, un coeur qui corrompt!
Parfois, il m arrive de penser si fort que je n entends plus le monde exterieur.
Dans les grandes arteres de Copenhague, il y a des gars qui tiennent des panneaux toute la journee pour indiquer un restaurant.
Je trouve que les hordes de touristes francais ont vraiment quelque chose d insupportable.
F.U.B.A.R. Spectacle de performances sceniques denoncant les 3 traffics illegaux> le sexe, les drogues, les armes. Nous voyos le spectacle au sujet des armes. En realite, c est plus un concert de rock country avec de bons musiciens et des choregraphies. Les danseurs etaient bien, malheureusement leur chore n etaient pas assez poussees, ils auraient pu aller beaucoup plus loin. Dommage! Je n ai pas reussi a completement entrer dedans, bien que l Art rechargera toujours mes batteries, de n im porte quelle maniere.
Depuis que je suis arrivee a Copenhague et que je voyage avec Gianni, on ne mange que des falafels ou des buffets de... falafels.
On part de l auberge glauque. On va dans une autre, Sleep in Heaven, aucun CouchSurfer ne veut nous prendre. Tant pis.
Kulture Box. Club electro. L ivresse du vendredi soir. Il n y a pas grand monde, a part quelques fils a papa drogues qui dansent dans l ombre. On rencontre des Danoises BCBG qui veulent aller dans un autre club mainstream. On leur dit d accord, on les laisse partir en velo, et on leur fait un faux plan. Des le debut, nous voulions rencontrer des Danois pour passer du temps avec, mais finalement, nous rencontrons que des gens qui ne nous correspondent pas vraiment. Alors on fuit, pour retrouver nos amis imaginaires.
COPENHAGEN _ NAGI & VIOXYMORE _ FALAFEL & HUMUS .
Il se passe tant de choses, ici, a Copenhague. Des choses qui ne se disent pas mais qui se ressentent profondement, simplement.
Gianni et moi avions des plans, des idees, des reves. Nous avions l ambition de se retrouver au Danemark et de vivre comme dans les films, en sautant dans un train au hasard pour voir ou le vent nous porterait, de decouvrir l inconnu chaque jour, chaque seconde, entre le risque de vivre et celui de mourir. Il trouve son compte dans la capitale. Et moi aussi, finalement. Comme une pluie de prises de conscience qui me tombent dessus, qui me heurtent et m apaisent, me delivrent de chaines. il est la, Gianni, a cote de moi, comme un miroir silencieux qui reflete ce qu il fallait que je comprenne en moi. Sauf qu il ne s en est pas rendu compte. Voila la magie d une amitie qui evolue a travers le temps, le voyage, quelque chose. Nous decidons alors de ne pas partir, d abandonner notre reve de vadrouilleur hasardeux. A quoi bon quitter un endroit lorsqu on y trouve enfin ce qu on recherche depuis longtemps?...
Je marche beaucoup dans les rues. Parfois il fait beau, parfois il pleut un peu, parfois c est l averse. Les gens me regardent etrangement quand, sous la pluie, je cours avec mon sac en forme de Jack Skellington dans mon manteau avec la tete qui depasse. Je veux sauver mes ecrits, ne pas prendre le risque que l eau detruise ma memoire.
En realite, la Petite Sirene de Copenhague a des jambes!!
Oscar Bar. Bar, cafe, bistro sympa ou on peut manger de bons nachos au four. Gianni et moi y sommes devenus des habitues.
Kastellet. Parc etant l ancienne base militaire (il y a encore des militaires, d ailleurs, qui patrouillent autour) avec de vieux batiments en briques et un moulin (juste pour me rappeler les Pays Bas).
Le musee Louisiana. Il se trouve a Humblebæk, entre Copenhague et Helsingør. Ce musee est defini comme le plus beau musee du Danemark, le Beaubourg danois, comme dirait le Routard... En y etant allee, j ai compris pourquoi! Il est tres grand, avec des jardins, des arbres, des statues de Joan Miro, Max Ernst, James Moore. Le cafe donne une vue splendide sur la mer, avec au loin, de la terre: la Suede. Il suffirait de traverser cette petite etendue d eau pour deja y etre...
- Al Taylor: Artiste polyvalent qui travaillait des sculptures et des travaux sur papier. Ici et maintenant sont exposes ses aquarelles et lithographies. je reste assez sceptique, peu captivee.
- "Gleaming lights of the soul". Une oeuvre de Yayoi Kusama consistant a une petite piece aux murs de miroir, eclairee par des ampoules multicolores qui descendent du plafond et se refletent dans l infini et l eau qui recouvre presque le sol. Le sentiment est etrange, celui de voir son propre reflet infini a travers ces boules colorees, comme dans un conte. Est ce cela, l image de l ame?
- "Fred & Frihed" (Peace & Freedom). Nombreux travaux foremidables de Pablo Picasso qui tournent autour de ses demarches artistiques a but politique, pour partager son sentiment vis a vis de la guerre mondiale et son combat pour la paix. Je suis fascinee, captivee par ses natures mortes splendides. Mais je trouve que le paradoxe de Picasso est qu il fait les plus vivantes natures mortes que j aie jamais vues...
" Only death finishes something." P. Picasso.
- Quelques videos conceptuelles, multiples sculptures de giacometti, quelques tableaux de Bacon, Kirkeby et Asger Jorn, que j aime bien.
- "Sent from my iPad". Oeuvres crees par David Hockney avec son iPad... Nature morte, portraits, couchers de soleil... Des centaines de dessins qui defilent sur des dizaines d iPad et iPhone accroches au mur. Le resultat est troublant! Si peu reel et pourtant autant precis dans les couleurs que les emotions d un tableau peint... Je trouve interessant cette idee, qui montre bien dans quelle direction nous sommes en train d aller: le numerique, encore et toujours, pour quitter l authentique.
C est tragique de savoir qu il y a des endroits magnifiques qu on ne reverra jamais.
Le meilleur Falafel de Copenhague se trouve en fait a Humlebæk.
Tijili Pop. Petit bar sympa a Nørrebro, tout pres de notre auberge. Ils font du bon tea chai et des apple pies merveilleuse. C est tranquille, l ambiance tres sympa, canapes, vieilles tables delabrees, papiers peints dechires. On s y sent chez soi. Je retrouve Gianni la bas en fin de journee. Et puis plein de gens qui parlent anglais debarquent. Ca tombe a pic: un meeting CouchSurfing! On leur parle, leur dit qu on cherchait justement un meeting pour rencontrer des gens, etc... Les gens sont etranges, on trouve une excuse pour s eclipser, encore une fois, pour retrouver nos amis imaginaires. Vive le paroxysme de notre contradiction. Je crois que Gianni n est pas fait pour le couchsurfing... ;)
Un peu plus loin sur la meme rue, il y a un Turc qui fait a manger. On se prend une assiette a partager, le Turc fait son paon en disant les quelques petites phrases de francais qu il connait. On discute avec lui, il est chou et vraiment sympa. Il sort son instrument de musique - une sorte de guitare au manche etroit et a la caisse de resonnance tres bombee - et il joue, et il chante. Il suffit de fermer les yeux, de savourer le humus et de se laisser bercer par cette musique pour se retrouver a des kilometres de la, loin de Copenhague, hors du Danemark, dans un pays oriental comme je n en ai encore jamais vu... Voila pourquoi j aime la musique, cette voix du Monde. Elle est le plus merveilleux moyen de transport.
Vioxymore. La vegetarienne qui voulait devenir historienne du lard.
Le silence est important, quand on voyage a deux. Gianni, je le laisse me prendre la main et me guider dans les rues encore inconnues de Copenhague. Notre premier jour, nous nous battions contre le vent pour ne pas qu il dechire notre carte. La deuxieme semaine, nous pouvions nous rendre n importe ou sans se perdre.
Le temps qui passe ne se voit pas: il s ecoute.
Musee d arts decoratifs. Tres grand, gratuit le mercredi, c est pour cela que j y suis allee, par curiosite. Beaucoup de travaux de Poul Kjaerholm sont exposes. Il etait professeur a la Royal Danish Academy of Arts School of Architecture. Les textiles etranges d Ane Henriksen sont aussi exposes. Ces deux artistes sont trews importants dans l histoire du design danois. La suite de l expo presente divers travaux d artistes danois, allant du genre avant gardiste au Funcionalisme en passant par de Stijl et Bauhaus. D autres salles montrent les divers arts decoratifs de plusieurs nations telle que la France (avec certaines ceramiques de Gauguin), le Japon, la Chine, l Angleterre, a divers periodes. Je remarque encore la grand fascination que j ai pour l art ancien, ces vieux objetrs qui ruisselent de souvenirs, temoins silencieux de moult secrets... Je tombe dans une salle presentant des objets d art traditionnel du Mexique. De vieux souvenirs magnifiques s epanouissent dans ma tete, narrant mon premier grand voyage jusque la bas. Les squelettes qui dansent, les tetes de mort en sucre, l humour noir des objets traditionnels, si colores... Je me sens toute emue, soudain. Et davantage en voyant le portrait de Frida Kahlo... Je crois que j ai beaucoup de choses a vivre et revivre dans ce pays qui a ete le premier a me fasciner.
Dans les musees de Design, il y a des chaises partout, mais on ne peut jamais s asseoir.
Vor Frelsers Kirke. Je la visite enfin, avec sa tour geante. La decoration est tres chargee, avec un immense orgue. J ai de la chance, quelqu un y joue au moment ou j y suis. C est magnifique...
Frederiks Kirke. Grande eglise circulaire, coiffee d une immense coupole avec les portraits des 12 apotres. On dirait un grand theatre, ou un opera.
Amalienborg Plads. Avec le chateau et les gardes qui restent plantes comme ceux du Buckingham Palace!
A force de tourner en rond dans cette ville, je m y sens enfermee. Bien sur, je l aime, cette ville. Grand coup de foudre, grandes emotions, quelque chose de merveilleux, car je m y sens bien, je m y sens chez moi et en securite. Mais j ai besoin d autre chose. De quelque chose de plus fort. Court circuit dans ma tete. Cerveau en fibrilation. Gianni y a trouve ce qu il cherchait, je ne peux pas l aider et il ne peut pas m aider. Je suis toute seule, depuis le debut. Et seule, je dois continuer. Petage de plomb a l interieur de moi. J abandonne tous mes reves de voir la campagne danoise. Sur un coup de tete, je reserve un train pour Oslo. Et ensuite, je poursuivrai mon reve, mon but, oui oui! le Cercle Polaire... Tant pis pour le Concert de Crystal Castle pour lequel j ai depense une fortune pour aller les voir au Northside festival a Aahrus. Deja la 3eme fois que je les loupe. Je les verrai bien un jour, je presume...
Il y a beaucoup d Americains dans cette autre auberge de jeunesse. Un soir, alors que je me sens un peu toute malade, toute bringuebalee, toute fatiguee, je decide de ne pas sortir pour me reposer. 4 Americains dans notre chambre se soulent, hurlent. Le genre de moment que je deteste et qui font emerger ma profonde misanthropie. Je les entends rire et parler de sujets pathetiques, hurler encore plus fort et puis faire "pssshhtt!!" comme s ils se rendaient soudain compte que j existais et que je voulais dormir. Ils se mettent alors a chuchoter quelques minutes, avant d exploser encore plus fort... C est insupportable.
Reflexion sur le Paradoxe.
Le Paradoxe mene au Doute et a la Remise en question de nos convictions car le Paradoxe est du a un desaccord emotionnel et personnel. Il tiraille entre deux envies opposees dont le choix d une des deux parait definitifs et irreversible. Ce qu il faut garder en tete est que ces deux envies doivent etre gardees en soi et que l Harmonie se trouve dans le juste milieu du Paradoxe. On ne peut pas choisir entre le Noir et le Blanc car tout est Gris. L Authentiticte existe lorsque nous sommes livres a nous meme dans l extreme solitude. Les masques ne peuvent jamais etre tous otes en meme temps devant quelqu un car la personne serait tellement vulnerable qu elle en souffrirait eperduement. C est possible, mais la COnfiance entre la personne qui ote ses Masques et l Autre doit etre immense et tres puissante. Si ce lien ne se cree pas, l Authenticite se trouve dans la Solitude uniquement et la Confrontation avec soi meme.
Les Paradoxes sont donc la pour temoigner d un desaccord a l interieur de quelqu un. Ecoutes, pris en compte, reflechis, ils amenent l Harmonie du monde internet et par consequent externe, car l infiniment grand est l infiniment petit et vice versa.
Je pars en voyage, et soudain, je remarque qu ecouter une musique profonde en regardant des images psychedeliques est bien plus prenant qu une bouffee de cigarette, qu a travers la maitrise de sa propre respiration il est possible de ressentir les symptomes de la Marijuana, que les baisers de quelqu un qu on aime sont bien plus enivrants qu une bouteille de vodka. Alors... pourquoi chercher plus loin que ce qui est juste a cote de soi?
Reflexion autour du phoenomene Obsession.
Des Obsessions, nous en avons tous. Des secretes, des revelees, des dangereuses, des passives, des etranges. L Obsession est comme une gangrene qui prend racine dans la tete. Il suffit d un petit detail du monde exterieur - une personne, un sourire, un geste, un regard, une couleur, une odeur, un decor, une voix... - pour que le cerveau fixe ses refoulements et projette tous ses ideaux dessus. L objet exterieur qui cree l obsession internet n y est pour rien, finalement. Tout se passe dans la tete de la persone qui doit delivrer quelque chose qu elle ne peut pas et utilise au hasard quelque chose provenant de l exterieur pour tenter de le faire. L Obsession se vit dans l imagination. Son cote positif est qu elle active la Creation et stimule l Imagination. Le Danger majeur est de confondre cette obsession surreelle avec la realite du monde exterieur, de prendre pour vrai ce qu on imagine. Dans ce cas, les choses deviennent paradoxales et en desaccord. Il y a toujours quelque chose a apprendre des obsessions. Pour les soigner, il faut attendre que le temps passe, ou les affronter en face et veritablement.
Gianni et moi retournons a la meditation. Et cette fois, j atteinds vraiment un niveau extraordinaire. Je ne perds pas une miette de ce qui se passe. Jusqu a ce que je ressente en mes mains et mes jambes des fourmillements intenses, empechant le moindre mouvement de mes doigts. Je vois dans mon corps des bulles toutes blanches qui circulent a toute vitesse partout, et des vertiges dans ma tete qui la tournenet a l envers. J e pourrais m envoler, je crois. Le bien etre et le bonheur qui m emballent sont d une puissance enorme... Je souris toute seule, je souris a moi meme. Et tout disparait...
Din Nye Ven. Ce cafe tres cosy est superbe, avec de vieilles tables vintage, des sieges et des chaises qui ne vont pas ensemble, des jeunes gens adorables, sympas et styles qui discutent calmement autour de leur Chai tea ou leur biere.
Ny Carlsberg Glyptotek. Comme le nom glyptotek l indique, il y a beaucoup de sculptures (et meme une nasothek... meme principe qu une vinotheque avec du vin, sauf que c est avec des nez de statues...) d artistes francais du 19 et 20 emes siecles comme Rodin et Carpeaux. Il y a tout un etage au sujet de l art ancien mediterraneen, allant des Grecs aux Egyptiens, de Etrusques aux Romains. Au niveau de la peinture: une belle serie de tableaux datant de l age d or danois (environ 1800 a 1850) ou je decouvre de magnifiques artistes tels que Dahl, Eckersberg, Juel ou Mastrand. De superbes oeuvres impressionnistes francais sont aussi exposees, ainsi que quelques sculptures de danseur de Degas. Cette partie est evidemment celle qui m interesse le plus. J ai tout de meme un sourire, en me baladant entre les sculptures datant de l Empire romain et Egyptien et de decouvrir une oeuvre coloree de Louise Bourgeois, sculpture etrange d un animal informe et rose. Superbe anachronisme! le musee lui meme est fantastique, mettant en lien deux grands et vieux batiments en briques, par le winter garden, un jardin de plantes exotiques avec un bassin a poissons sous une coupole en verre. Superbe decor!!
Dans les rues de Copenhague, il n y a pas de panneaux a touristes qui indiquent ou sont les endroits importants. Donc si t as pas de carte... t es cuit.
Le sourire est quelque chose d exceptionnel qui possede une force incroyable. L autre jour, je marchais de ma "demarche de corbeau", comme dirait Gianni, c est a dire tete baissee, epaules en avant, grandes enjambees, sourcils fronces. Je marche comme cela quand je pense trop fort, qu un detail inquietant stagne dans mon esprit et que je tente vainement de trouver une solution. Je ne suis pourtant ni triste ni en colere, bien que j en aie l air. Je pense simplement et je fonce droit au but. Et soudain, l autre jour, comme je disais, j ai rencontre une personne qui marchait en sens inverse. J ai juste leve les yeux pour ne pas lui foncer dedans, et elle m a souri. Juste souri. C est stupide, comme reaction, de sourire... Ce sont just des muscles aux noms absurdes qui s etirent. Et pourtant, c est tellement beau, une inconnue qui sourit. Cette simple stupidite devient soudain belle et importante. Et elle peut changer bien des choses. Apres la rencontre de cette inconnue au sourire, j ai perdu le fil de mes pensees. Et ma demarche de vieux corbeau ravage est devenu le vol d une colombe genereuse...
Ici, a Copenhague, je n ai pas peur de regarder les gens en face. Par exemple, a Yverdon (exemple au hasard, voyons...), j evite le regard des inconnus dans la rue. De toute facon, ils ne sourient jamais. Et j ai peur qu ils interpretent mon regard pour une menace. Ici, les gens prennent le temps de me voir, de me sourire, de me regarder. Et je n ai pas peur de le soutenir, leur regard. Ni de leur sourire. Au contraire. Les gens ici semblent tellement heureux...
Le dernier soir que Gianni et moi passons ensemble, nous nous partageons une assiette vegetarienne, comme d habitude. Et nous allons boire un cocktail dans un bar nomme Living Room. Parce qu a Yverdon, d ou je viens, il y a une boite qui porte ce nom, et a Lugano, d ou il vient, aussi. Un point commun entre ce que nous fuyons tous deux et ce que nous trouvons dans notre fuite revelatrice. On se quitte etrangement, dans la rue, sous la petite pluie qui nous trempe doucement. La derniere fois qu on s etait quittes, c etait aussi dans d etranges circonstances, a l etranger. La prochaine fois qu on se reverra, ce sera en Suisse.
Etreinte chaleureuse. Et bon vent, Gianni. Ma route continue. La tienne aussi. On se retrouvera. Bien sur qu on se retrouvera...
Le vent tourne pour moi aussi. Le lendemain, tres tot, je saute dans un train pour Oslo. La Norvege, deja... la Norvege.. oui.... Mon but approche.
NEXT STOP : OSLO !