" La solitude est très belle, quand on a près de soi quelqu’un à qui le dire."
Gustavo Becquer.
Retour au Nord. Au-delà du Cercle Polaire. Soleil de minuit, encore une fois. Nuits blanches, encore quelques fois.
Parler de mon séjour à Kiruna romprait définitivement avec mon but de montrer une vision objective de ce blog. C’est pourquoi, je n’en parlerai pas beaucoup.
Il y a cependant une chose que j’ai comprise, quelque chose que j’ai accepté, une image que j’ai construite.
J’ai compris qui j’étais, ce que j’étais et ce qui se cachait derrière mes multiples masques archéologiques. C’est beau, de creuser et découvrir cette douleur cachée, de la réveiller et l’apaiser. Elle s’est exprimée assez, à présent, pour pouvoir se rendormir et disparaître, pourrissant dans la terre nouvelle sur laquelle je vais cultiver mon nouveau jardin intérieur. Encore plus beau, plus coloré, plus sain et parfumé.
Je veux créer, créer de la musique, de la poésie, de la beauté et faire rêver. Je veux transmettre, apprendre et enseigner. Je veux la paix, la beauté et la solitude partagée. Je veux le calme et la sérénité. Je ne veux pas entrer dans le moule ni dans ces boîtes. Ma Boîte à moi, je la construirai seule avec de vieux morceaux de rien et une grande fenêtre avec vue sur une falaise. Ainsi, je pourrai toujours m’échapper avec le bruit de la mer…
Kiruna Kyrka. Église en forme de tente sámi, avec une tour à ses côtés. Elle est peinte en rouge et recouverte d’écailles, d’une élégance silencieuse et magnifique. Elle date de 1912.
LKAB, la mine de fer. Rendez-vous à l’office de tourisme. Un grand groupe de personnes, deux guideds habillées en combinaison arborant fièrement le sigle LKAB. Tout le monde dans le bus ! « Let’s go ! » vers la mine de fer, creusée dans la montagne Kiirunaara. Et lentement, on plonge dans l’obscurité en entrant dans un tunnel. La première fois que je me retrouve immergée dans le noir total depuis un mois. On roule en descendant pendant de nombreuses minutes. Il paraît que cette route celle où il y a le plus de trafic à Kiruna. J’ai le sentiment d’être dans un vieux train fantôme. À environ 740 mètres, le bus s’arrête et tout le monde descend dans la fraîcheur sous.-terraine. Nous sommes divisés en deux groupes : ceux qui parlent anglais et ceux qui parlent suédois. Malheureusement, notre guide est celle que nous avons appelé Führer, à cause de son autorité militaire, trahie toutefois par quelques tremblements d’insécurité dans la voix. Le port du casque est obligatoire, forcément, car les chutes de pierres ne sont pas rares. La Führer nous bombarde d’informations et répond volontiers aux questions qu’elle dévie sur autre chose quand elle ne comprend pas ou ignore la réponse. Il y a beaucoup de détails techniques et de termes en anglais que je ne comprends pas. Mais l’essentiel, je le capte. Après avoir commencé à creuser dans le ventre de la terre, à la recherche de cette ressource devenue essentielle de nos jours, ils ont dû vider un lac pour continuer sans danger d’effondrement et d’inondation. Et l’éternelle insatisfaction de l’homme en voudra toujours plus et plus encore, car trop n’est jamais assez. Le souci majeur est que la ville de Kiruna se trouve sur d’importants points très riches enf er. Continuer de transformer la terre en gruyère est devenu un grand risque d’affaissemtn pour toute la ville. Le plan de la commune ? Déplacer toutes les maisons les unes après les autres. Comment ? Grande question. La réponse demeure toujours en suspens. Où ? Grand problème. La solution reste encore en suspens. Kiruna est la ville la plus au Nord du pays, après, les terres appartiennent aux sámi qui se sont assez battus pour les garder et pour rester. Alors quoi ? Le gouvernement va-t-il encore chasser les indigènes juste pour ses propres intérêts et profits ? Où sera la limite de tout cela ?...
Un film de quinze minutes est projeté. C’est celui que j’avais vu au musée LKAB à Gällivare, avant d’aller dans la mine de cuivre. Je prends tout de même le temps de le regarder une deuxième fois. Tout commence avec de beaux paysages nordiques soulevés d’une mélodie à la flûte de pan. Des familles sámi, avec leurs rennes et leur magie. La voix off, grave et profonde, commente. « Regardez la beauté de nos paysages. Le mystère du fer dans les montagnes que les sámi ont découvert. » Evolution des techniques d’extraction et d’exportation du fer grâce à l’arrivée des voies de chemin de fer. Les beaux paysages lapons qui se détruisent lentement… La fierté des Suédois. Parce que cette mine est une des choses qui fait vivre le pays et rend possible la vie au Nord, au-delà du Cercle Polaire Arctique. Mais la nature, leur premier trophée, cette nature imposante et merveilleuse, dotée de charmes rares et puissants… Ils l’ont oubliée. Et ils se sentent forts et fiers de la détruire pour le profit. Je suis dégoûtée… Et je trouve cela effrayant, creuser encore et toujours. Oui ! Et après ? Quand ils auront touché le fond ? Le centre de la terre ? Quand ils auront tout détruit ? Qu’est-ce qui se passera ?... La guide Führer est étudiante en journalisme, ce boulot est un petit job d’été. Je ne crois pas qu’elle ait conscience du poids des paroles de son speech appris par cœur après un bourrage de crâne intensif. Je ne crois pas qu’elle ait réalisé qu’elle bosse pour ceux que j’appelles les terroristes de la nature.
Elle s’en fout, de toute façon, j’imagine. Elle le fait… pour son argent.
Le vent tourne à nouveau. Je dois quitter le Corrupteur. Quand le reverrai-je ? Bientôt. Je voudrai.
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